19 Avril 2020
Cette journée avec la famille de Pietro m'avait apporté une nouvelle preuve que tous mes efforts à L’École ne faisaient que me bercer d'illusions. Le mérite ne suffisait pas, il fallait autre chose, que moi je n'avais pas et ne savais pas apprendre. Quelle honte, mon flot de paroles confuses, sans rigueur logique ni calme ni ironie, contrairement à ce que savaient faire Mariarosa, Adele et Pietro ! J'avais intégré l'acharnement méthodique de la recherche universitaire qui soumet à vérification la moindre virgule, ça oui, et je le démontrais lors des examens ou dans le mémoire que je rédigeais. Mais de fait, je demeurais complètement démunie, acculturée à l'excès, privée de cette cuirasse qui leur permettait, eux, d'avancer d'un pas tranquille. (...)
Il me reste encore des livres que je n'avais pas encore lus. C'est une chance...
Je viens de finir Le nouveau nom, deuxième tome de la saga de L'amie prodigieuse d'Elena Ferrante. J'ai particulièrement été intéressée par un sujet qui y est développé grâce au cheminement de l'un des personnages, Lina, qui incarne ce questionnement : peut-on vraiment sortir de sa condition ?
Se défait-on jamais des marqueurs de ses origines ?
Qu'on le veuille ou non, il me semble que c'est impossible. J'entends, on peut bien sûr évoluer, grandir, mais inévitablement on est rattrapé par des habitudes de langage, de comportement, de références ou d'absence de références. On est repéré à d'infimes détails.
Parfois, rarement peut-être, on aimerait y échapper, mais...
Parfois on croit que l'on s'est lavé de tout ce qui peut nous bloquer dans l'histoire, les coutumes, les habitudes, de nos ascendants qui nous pèse, pourtant...
Parfois, on se dit qu'il faut l'admettre, qu'il est impossible de lutter, que malgré tout, l'empreinte est indélébile.
Parfois, on se dit, qu'au-delà des ressentiments, ce peut être une force...
On n'est pas du sérail ? Et alors ? On se "fera" tout seul... ou pas.
Je sais aussi que parfois cette tache originelle pèse, voire détruit.
Osons être nous-mêmes et laissons-nous être porteurs de l'identité, remarquable ou détestable de ceux qui nous ont précédés.
C'est à ce prix que l'on pourra oser vivre pleinement notre singularité.
Et vous, que pensez-vous de ce poids, lourd ou léger, que nous ont transmis nos ancêtres et que nous devons assumer ?
eMmA MessanA