Tu repasseras !

14 Novembre 2021

AVIS DE REPASSAGE !

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•• tu repasseras ••

Là tout de suite, j'ai comme un coup de mou,

dépassée par une pile de projets pas du tout électrisants,

un peu avachie comme une pattemouille oubliée dans un panier.

J'aime bien ce mot qui sent bon son pesant d'autrefois.

Dans ce type de situation, ce qui me défroisse les neurones,

j’en demande pardon à toutes celles qui se sont vaillamment battues pour nos droits et nos libertés les plus élémentaires,

c’est la perspective d’embrasser une énorme pile de linge qui fleure bon la lavande

et de me planter, conquérante et toute ragaillardie, devant la table à repasser.

Rien que d'imaginer devoir manier l'enclume qui me sert de fer,

la rendre assez tendre et légère pour labourer avec délicatesse une dentelle ou une soierie

j'en oublierais presque les faux plis qui insistent pour zigzaguer sur la trame de nos jours.

Et au fil des effets bien nets et bien pliés, je me détends miraculeusement en revenant à moi.

Une sorte de satisfaction béate me dessine un sourire niais sur le visage

faisant tomber une pluie sur l’incendie de mon matin d’angoisse,

effaçant les vapeurs suffocantes du doute qui m'envahissaient et qui demeureront secrètes.

Parce que pour m'entendre geindre et décrypter les peines qui brûlent en moi,

tu repasseras !

Petite pile de napperons à la dentelle chebka amoureusement cousus par ma mère, Carmèle Frau.

Jeune fille, à la maison
Elle maniait l'aiguille à merveille
Pour réaliser la fine dentelle Chebka
Et en parer nappes et napperons
De toutes ses soeurs, c'était elle la plus douée.

Extrait de "Transpositions hasardeuses" éd. Maïa page 59