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Pour une poignée de ciel

   Pendant ce printemps de confinement, j'ai découvert avec grand plaisir les Editions Bruno Doucey, lui même poète et éditeur.

Plusieurs fois par jour sur facebook, il animait sa page en nous faisant la lecture de poésies.

Ces rendez-vous ponctuaient nos journées d'une ample respiration, ouvrant grand nos horizons fermés et ligotés entre nos quatre murs.

Je n'ai jamais autant ressenti combien la poésie nous rendait encore plus sensibles au besoin de humer ce vent de liberté et d'évasion que celle-ci procure, à quel point elle peut ériger un rempart de douceur contre la brutalité des relations humaines trop souvent inhumaines.

Vous qui connaissez mon attachement pour l'Inde, vous ne serez pas surpris d'apprendre que parmi les nombreuses œuvres présentées, j'ai été immédiatement attirée par l'anthologie établie et traduite par Jiliane Cardey, Pour une poignée de ciel. Poèmes au nom des femmes dalit, dont la préface a été écrite par Natacha Appanah.

Il est impossible de ne pas être sensible à ces poésies qui content la vie de ces femmes dites Intouchables. Malgré un système de castes aboli depuis 1950, la notion d'intouchabilité demeure une réalité toujours très vivace. On a juste changé le vocable "intouchable" en "dalit" (qui signifie "opprimé"). Mais, ça ne change rien. Ce sont les misérables parmi les plus misérables. Ce sont des femmes que l'on oppresse, mais c'est par elles que peu à peu l'Indienne de demain relèvera la tête, "Car, maintenant / La femme dalit / S'est saisie du crayon" (Sudhïr Sagar).

 

L'édition est bilingue hindi/français, ce qui à mes yeux ajoute à la beauté de l'ouvrage, non seulement visuellement (j'aime l'esthétique de ces caractères qui nous transportent loin) mais également pour ce que cela implique de respect vis-à-vis de ces femmes qui pour nombre d'entre elles demeurent illettrées hélas, mais qui portent en elles l'espérance d'une éducation à leur portée ou de celle de leurs filles.

Vous pouvez visualiser la vidéo postée par Bruno Doucey sur facebook au sujet de ce livre :  https://www.facebook.com/editionsbrunodoucey/videos/278965313254542/  

La lecture de cet ouvrage que j'ai enfin pu récupérer aujourd'hui auprès de ma libraire indépendante à laquelle je l'avais commandé durant le confinement, a réveillé chez moi bien des souvenirs.

Aussi, j'ajoute à cette page quelques photos de mes voyages en Inde du sud, où j'ai côtoyé principalement des Adivasi. 

Tous m'ont fait un peu grandir à chaque séjour. Ils demeurent dans mon cœur à tout jamais. Je ne les oublie pas.

Vous l'aurez compris, je vous recommande vivement la lecture de ce beau recueil de poésies, si singulier.

A bientôt,
eMmA MessanA

"Une
Illettrée pauvre
Candide de cœur
Quoique noire de peau
Quand elle rit aux éclats d'un rire libéré
Le ciel s'emplit
De rangées de volutes blanches qui ondulent (...)"

Extrait du poème "Les femmes adivasi" de Nirmala Putul (in "Pour une poignée de ciel." Anthologie établie et traduite par Jiliane Cardey, aux Éditions Bruno Doucey

Je me souviens comme si c'était hier de la tendre et timide coquetterie de cette femme adivasi* dans les ruelles de son pauvre village de Periyakattupalayan dans le Tamil Nadu. Elle tenait absolument à se recoiffer avant que je ne prenne ma photo. C'est un moment que je n'oublierai jamais et cette photo est pour moi comme un talisman. 

* adivasi : primo-habitants de l'Inde. Plus d'explications en suivant ce lien : http://www.emmacollages.com/2014/05/pour-les-coquettes-colliers-adivasis.html

Periyakattupalayan (Tamil Nadu), mars 2010 © eMmA MessanA
Periyakattupalayan (Tamil Nadu), mars 2010 © eMmA MessanA

Periyakattupalayan (Tamil Nadu), mars 2010 © eMmA MessanA

Ces crayons-là sont certes de couleur, mais je me souviens qu'ils avaient fait le bonheur des ces élèves et de leurs maîtresses après la lecture de The very hungry caterpillar d'Eric Carle. Récemment, une des maîtresses me parlait encore de ces séances de lecture...

Apres School près de Pondichéry, mars 2014

Apres School près de Pondichéry, mars 2014

(...) Ça suffit...
Je voudrais
Que mes enfants aussi puissent manger du dal
Avec bonheur comme vous !
Qu'ils puissent changer leur futur
Que leurs mains
Ne manient pas la pelle comme moi
Que comme vous elles tiennent
Un crayon !

Extrait du poème "Est-ce que vous savez à propos du dal..." de Jay Kaushal (in "Pour une poignée de ciel" Anthologie établie et traduite par Jiliane Cardey Editions Bruno Doucey p. 145)

Lawspet (Tamil Nadu, Inde du sud), mars 2014 © eMmA MessanA

Lawspet (Tamil Nadu, Inde du sud), mars 2014 © eMmA MessanA

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E
Je suis très très émue à la lecture de ton billet.Tes photos , si bien narrées , sont sublimes , mais j'adore la dernière qui me touche profondément. Je ne connais pas l'Inde mais j'ai été attirée très tôt par ce pays plein de mystère pour moi. Je note le livre de poèmes et je vais le commander.<br /> Merci eMmA pour ce partage chaleureux et enthousiaste.<br /> Douce soirée, je t'embrasse .
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E
Ah la dernière photo, Erato !... Cette maman tenait son enfant dans ses bras comme son bien le plus précieux. Au-delà de ce lieu qui fut la grande déchetterie de Pondichéry (avec notamment des déchets médicaux arrivant quotidiennement de l'hôpital), elle irradiait d'un véritable lumière. je n'ai pas voulu (osé) la prendre directement en photo par respect. Il me semble que ces mains et le bracelet de cheville de son enfant contenaient cette précieuse lumière...<br /> Tu vas beaucoup aimer ce livre établi et traduit par cette jeune femme, Jiliane Cardey, que je remercie d'aimer ainsi l'Inde en mettant en avant leurs femmes opprimées mais qui commencent à lever la tête. Un coup de chapeau aussi à sa maison d'édition car il est tellement rare de trouver des éditeurs prêts à oser défendre la poésie en général et des œuvres aussi atypiques en particulier.<br /> Fasse le ciel (et l'éducation) que nos petites protégées commencent lentement à prendre une place digne et surtout heureuse parmi les leurs.<br /> Merci pour tes mots, ainsi que pour ta sensible attention.<br /> Je t'embrasse.
L
ton attachement pour l'Inde émeut, le poème, tes photos tout autant !!<br /> tu as trouvé un éditeur poète qui semble apporter la sérénité à coté de la vie parfois difficile à vivre<br /> bonne journée en Vendée, bises
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E
Un éditeur qui nous a portés durant le confinement en élargissant nos horizons bornés de confinés. le confinement n'a pas que du mauvais, je le conçois, car il nous aura permis (contraints ?) aussi de nous questionner en profondeur sur le sens que l'on souhaite donner à nos vies. <br /> La poésie me semble souvent représenter un refuge...<br /> Je t'embrasse.